Diversion face aux problèmes sociaux

Rythmes scolaires
mardi 7 décembre 2010

A l’instar d’un gouvernement qui multiplie les opérations de communication pour masquer
les problèmes sociaux, le ministère de l’éducation nationale s’active pour donner le
change. Les réformes engagées au lycée ou dans le primaire ont largement dégradé les
conditions de travail et d’enseignement ; le démantèlement de la formation initiale se
révèle être le fiasco annoncé. Dans un contexte de contestation et de dégradation du système
éducatif, la conférence sur les rythmes scolaires est une occasion inouïe de faire
diversion. Les médias et tout ceux qui alimentent la vulgate pédagogique sont friands du
sujet ; pourtant, il n’est pas sûr qu’il ressorte grand-chose de cette nouvelle grande esbroufe.

Les rythmes scolaires au service de l’économie

On trouve dans cette commission un ancien recteur, un haut fonctionnaire européen, un
spécialiste de la violence scolaire, un ex-secrétaire d’État à la Jeunesse et aux Sports. Et
même, un cadre dirigeant à la SNCF, la présidente du Centre des monuments nationaux
ou un directeur de Sciences Po, parallèlement responsable des études à l’Institut
Montaigne. En tout, 27 personnes, issues de tous les champs, y compris économique et
touristique, puisque, comme l’a souligné le ministre de l’Éducation nationale "aujourd’-
hui, l’école rythme toute la société". Or dans cette commission, aucune trace de représentants
de parents d’élèves, même si ceux-ci sont invités à donner leur avis par internet ;
les syndicats d’enseignants non plus ne sont pas consultés. Journées rallongées pour les
élèves en difficulté, journées marathon pour les enseignants. A part un nouveau déballage
démagogique, le ministère de l’éducation n’a rien à offrir, au risque de contredire les
réformes qu’il a lui même initié. Comment poser la question des rythmes scolaires quand,
pour satisfaire son électorat, l’UMP a mis fin à l’école le samedi ? Les enseignements ont
été resserrés sur quatre jours et ceux
qui en pâtissent le plus sont les élèves
en difficultés. Bien souvent ce sont
ceux qui n’ont pas l’opportunité de
s’évader le weekend qui doivent
ingurgiter 2h de plus par semaine
sous forme d’aide personnalisée. Que
dire aussi des conditions de travail des
enseignants ? Les équipes sont prises
dans une course contre la montre. La
qualité des temps de concertation
s’en ressent, et lorsqu’on a cumulé
temps d’enseignement, d’aide personnalisée
et réunions, les journées
paraissent interminables et épuisent
les personnels. Il n’y a rien à attendre
non plus des expérimentations
conduites dans les lycées.

Un nouveau transfert de charge vers les collectivités locales

Remettre à plat, les rythmes scolaires engage une réflexion et des investissements qui se
déclinent dans tous les compartiments de la société : temps de travail et horaires des
parents, disponibilité des collectivités locales qui souvent ont la charge du temps périscolaire
et des infrastructures. Il est bien difficile de croire qu’en période de rigueur les fonds
nécessaires à cette révolution seront débloqués par l’État. Les collectivités locales déjà
étranglées par les transferts de charges engagés par les politiques de décentralisation ne
pourront pas non plus assumer ce fardeau. Le ministère prendrait-il un risque insensé ?

Le juteux marché des activités extra scolaires

Nous envisageons la question sous l’angle des services publics mais nous aurions tort
de sous-estimer les prestataires privés qui sont sur les rangs pour assurer ces missions.
Les jardins d’enfants se multiplient dans certains départements, en concurrence avec
l’école maternelle, financés par des subventions publiques, certes, mais avec des personnels
et un cadre de fonctionnement totalement privé. Dans les Réseaux
Ambitions Réussite, le partenariat avec des grandes entreprises est déjà institué et la
mise en place d’activités sportives sponsorisées par des leaders du marché est tout à
fait plausible. La conférence engagée par le ministère se réduira donc à un aréopage
de spécialistes et de partenaires triés sur le volet pour leur franche adhésion aux propos
officiels. Dans ces circonstances les conditions de travail des enseignants, ou les
conditions d’apprentissage des élèves risquent fort d’être reléguées au second plan. Il
reste que l’externalisation des activités péri-éducatives pourrait être l’une des véritables
préoccupations de Luc Chatel et de son cabinet.


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