Les PPMS, c’est bien. Les locaux adaptés, c’est mieux !

vendredi 5 avril 2013

A la suite de l’explosion de l’usine AZF à Toulouse le 21 septembre
2001, l’Etat a mis en place des procédures de mise en sûreté
des élèves et des personnels des établissements scolaires en cas
d’accident industriel majeur. Cela se traduit au niveau de chaque
établissement par la rédaction d’un PPMS et des exercices d’alerte
réguliers, sur le même principe que les exercices incendie.
Peut-on considérer ces mesures comme utiles ou relevant du "
parachute " qu’ouvrirait l’Etat en cas de nécessité ? L’analyse des
événements de Toulouse et la comparaison avec les procédures
préconisées depuis devraient nous éclairer.

Toulouse, le 21 septembre 2001, 10h17

Dans l’usine AZF, propriété du groupe Total, on fabrique depuis
1927 des produits chimiques (engrais à base de nitrate et de
chlore). Quand l’usine a été construite à 5km du centre ville,
l’agglomération ne s’étendait pas jusqu’à ces berges de la
Garonne. Mais la ville s’agrandit. Il fallut créer un périmètre de
sécurité, basé sur l’hypothèse d’un dégagement accidentel de gaz
toxique d’une des trois usines chimiques voisines, toutes classées
SEVESO. Ce périmètre est basé sur un principe technocratique :
on calcule le taux de dissolution du gaz dans l’air jusqu’à son
niveau d’innocuité sur l’organisme, à partir du centre de l’usine,
sans tenir compte ni du relief ni des vents dominants. Or les unités
de production dangereuses ne sont pas au centre des usines,
et la dispersion des gaz ne se fait pas de manière géométrique en
cercles concentriques et réguliers. C’est ainsi que des terrains se
trouvent autorisés à la construction alors qu’ils sont directement
sous le " vent chimique ". Le seul risque pris en compte était la
fuite d’un gaz toxique (phosgène).

Or le 21 septembre 2001, à 10h17, un stock d’environ 400 tonnes
de nitrate d’ammonium a explosé dans un hangar, creusant
un cratère de forme ovale de 70 mètres de long et 40 mètres de
largeur, et de 5 à 6 mètres de profondeur. La détonation a été
entendue à plus de 80 km de Toulouse. Un séisme de magnitude
3,4 a été enregistré.

Le bilan officiel fait état de 31 morts, dont 2 élèves d’établissements
proches, et environ 2 500 blessés dont une trentaine dans
un état grave. La majorité des victimes a subi les effets directs ou
indirects du souffle de l’explosion, éclats de verre notamment.
Selon l’Institut de veille sanitaire, de nombreuses personnes souffrent
de désordres psychiques (dépressions, angoisses, insomnies),
mais aussi de problèmes auditifs.

Outre les dégâts aux entreprises, commerces, bâtiments publics
et habitations, plusieurs établissements scolaires ont été partiellement,
voire totalement détruits. Le bilan humain aurait sans
doute été plus lourd si l’immense majorité des élèves ne s’étaient
pas trouvé en récréation à ce moment là…
En 2001, les consignes en cas de catastrophes étaient claires et
connues : se confiner dans les établissements scolaires et écouter
les consignes en se branchant sur France Inter. Il fut impossible
de se confiner pour les écoles les plus proches du sinistre : plus
aucune fenêtre ou porte, parfois les murs ou les toits soufflés. Ni
le téléphone filaire, ni le téléphone cellulaire ne fonctionnaient.
France Inter diffusaient des rumeurs d’attentats. Beaucoup d’enseignants
ont pris la responsabilité de quitter les établissements
ravagés pour se réfugier dans des bâtiments plus épargnés, au
désespoir des familles qui cherchaient à récupérer leurs enfants.
Visiblement, les consignes pour les catastrophes avant 2001
étaient inappropriées. Le sont-elles devenues avec le texte C. n°
2002-119 du 29-5-2002 ?

Le Plan Particulier de Mise en Sécurité

La circulaire n°2002-119 du 29-5-2002 (BO hors série n°3 du
30-5-2002) impose pour chaque établissement la rédaction d’un
PPMS, avec un cadre national, mais tenant compte des spécificités
locales. Ce PPMS devra être, lors de son élaboration puis
annuellement, soumis à la commission d’hygiène et de sécurité
de l’établissement, quand elle existe, au conseil d’administration
de l’établissement, et présenté au conseil d’école. Une information
claire aux familles et une éducation à la sécurité, notamment
dans le domaine des risques majeurs, doit être mise en oeuvre, de
l’école maternelle au lycée, dans le cadre des programmes scolaires,
afin de permettre aux enfants d’adopter le plus tôt possible
des comportements réfléchis et adaptés. La rédaction de ce projet
implique de nombreux intervenants et incombe localement
aux chefs d’établissements et directeurs. Les collègues se sont
plaints de la lourdeur de la tâche ainsi que de leur incompétence
dans le domaine de la sécurité.

En cas de catastrophe (naturelle ou industrielle) l’alerte est
déclenchée soit par les autorités soit par le directeur lui-même. Le
signal sonore interne à l’établissement doit être différent du
signal incendie. Il est recommandé d’écouter la radio pour obtenir
des informations. Les personnels doivent continuer à assurer
l’encadrement des élèves en rejoignant les lieux prévus pour la
mise en sécurité. De plus il faut garder une liaison régulière avec
les autorités et les secours, tout en demandant aux parents d’élèves
de ne pas appeler et de ne pas venir chercher leur-s enfant-s !
Un exercice d’entraînement par an est obligatoire. Une série de
documents en annexe de la circulaire complète de façon pragmatique
et précise les mesures à prendre.

Peu de locaux répondant aux normes

Toutefois, force est de constater que cette circulaire n’aurait pas
ou peu d’intérêt lors d’une catastrophe type AZF. La radio n’avait
pas donné d’informations utiles avant une bonne heure, notamment
la nécessité de se confiner, alors qu’un nuage orange de
chlore survolait les quartiers dévastés par l’explosion. Les personnels
des écoles sinistrées ont été dans l’incapacité de confiner
leurs élèves, les établissements n’ayant plus aucune fenêtre ou
porte intacte, parfois les murs et les toits ayant eux aussi été éventrés.

Il existe peu d’établissements scolaires qui ont des locaux capables
de répondre aux normes de mise en sécurité. Ceux qui n’ont
pas été touchés par l’explosion ont confinés leurs élèves. Et comment
"garder une liaison régulière" quand la téléphonie ne fonctionne
plus, quand les rues sont encombrées de gravats et de
véhicules accidentés, embouteillées par les victimes fuyant la
zone ? Comment empêcher un parent de venir à l’école chercher
son enfant et repartir avec, ou simplement d’essayer de s’informer
de l’état de santé de celui-ci ?

La mise en place d’une information précise

Cependant, on ne peut reprocher à cette circulaire d’être inefficace.
Bien au contraire, elle a le mérite de mettre en place une
information très précise pour les citoyens et usagers des services
publics sur les risques naturels ou industriels présents dans leur
environnement. Cette information s’accompagnant d’une éducation
au risque naturel et aux comportements à adopter en cas
de catastrophe permet à chacun, adulte et enfant, de ne pas se
trouver face à l’inconnu de l’origine du sinistre. Combien de
Toulousains savaient-ils ce qui se fabriquait à AZF, mais aussi
dans les usines voisines de la SNPE et de Tolochimie ? Il est probable
que ces beaux plans de mise en sécurité des élèves rencontreraient
des dysfonctionnements lors d’une catastrophe ; mais
au moins les personnels, les autorités, les parents et les élèves
sauront quoi faire et ne pas faire.

En espérant que plus jamais il n’y ait d’explosion d’usine chimique,
de tempête ou que ne surviennent un jour un problème
nucléaire grave.

Il est à regretter aussi que cette charge administrative vienne
alourdir le travail et les responsabilités des directeurs.


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